La Build, Microsoft et ses développeurs

Cet article aurait pu s’appeler « un développeur Java au pays du C# », voire « perdu au pays du C# ». Mais il aurait été inexact, car on ne parle par que de C# dans une conférence Microsoft. Pardon, dans LA conférence Microsoft organisée à destination de ses développeurs. Et contrairement à ce que l’on aurait pu croire, même en tant que développeur Java, on ne s’y perd pas !

J’ai la chance de passer cette semaine à San Francisco (c’est déjà une chance en soi), pour assister à la Build, conférence que Microsoft organise à destination des développeurs qui travaillent avec ses technologies (et ça aussi c’est une chance supplémentaire).

C’est assez singulier de se retrouver à nouveau au Moscone Center, là où j’ai déjà eu la chance de pouvoir assister à Google IO (deux fois, et j’y serai encore le mois prochain), et JavaOne. Même lieu, même public ! Je te promets, cher lecteur, que rien ne ressemble plus à une assemblée de développeurs qu’une autre assemblée de développeurs. Et j’insiste sur le masculin, car, dans tous ces cas, la gente féminine est malheureusement bien peu représentée.

Singulier et impressionnant. Même si le Moscone West est le plus petit des trois Moscone (il y a aussi le North et le South), il permet tout de même d’accueillir environ 6 mille personnes dans la salle de keynote. Impressionnant aussi de part l’organisation, impeccable de la récupération de son badge à l’accueil dans les salles. Ca doit venir du sens de l’organisation et du service de ce côté-ci de l’Atlantique.

Impressionnant enfin, car une keynote est un événement auquel toutes ces grandes sociétés (je parle de Microsoft, Google et Oracle) attachent une très grande importance. Elles savent que la presse et les investisseurs ont les yeux braqués sur ce qu’il s’y dit et la façon dont les annonces sont reçues par le public présent. Le spectacle est parfaitement huilé, le show est magnifique. Trois heures de keynote qu’on ne voit pas passer et quantité d’informations qui intéressent un public beaucoup plus large que les seuls développeurs Microsoft.

Il est étonnant de voir la façon dont l’actuel PDG, Satya Nadela (réveille-toi précieux lecteur, Steve Ballmer a été sorti il y a longtemps) s’adresse à son public. Les même phrases, les mêmes mots, la même gestuelle que les keynotes de Vic Gundotra ou Sundar Pichai. Remerciements aux développeurs, adresse directe : regardez les plateformes que nous construisons pour vous, regardez la base de clients que vous pouvez toucher au travers de nos plateformes. Les présentateurs connaissent leur public, et savent trouver les mots qui vont faire mouche.

This conference is all about celebrating and challenging the creativity, the ingenuity that you all bring to build new and great things on top of platform innovation that we make available to you. — Satya Nadela

Ces trois types d’annonces sont communes aux keynotes de Microsoft et de Google, dans une moindre mesure à celle de JavaOne. Un peu de méthode Coué dans ce discours. Après tout, pourquoi pas ? Il est de toute façon rassurant, en tant que développeur, de se dire que les technologies sur lesquelles on développe son expertise sont pérennes et supportées par les plus grands groupes informatique.

Dans quelle direction Microsoft se dirige-t-il ? Il y a des chances que ce soit le sens du vent, et si ça ne l’est pas encore, ça peut le devenir. Je veux dire par là que c’est le vent qui suit Microsoft, ou Google, ou Oracle. Qu’on ne s’y trompe pas.

Plusieurs grandes choses ont été annoncées. La sortie de Windows 10 bien sûr. On saute de 8 à 10, mais surtout vers une version universelle, puisque Windows va être le premier OS commun à toutes les plateformes : téléphone, tablette, PC de bureau, Raspberry, XBox, et Hololens. À cela s’ajoute la notion de continuité d’application, qui permet à une application unique de s’adapter naturellement au terminal sur lequel elle s’affiche. Un peu à la manière des sites Web dits « responsive », les applications Windows deviennent également auto-adaptatives.

L’annonce vient avec une autre : grâce à un programme de mise à jour agressif (c’est le prix qui est agressif, puisqu’il est gratuit !), Microsoft annonce que d’ici à 3 ans, que Windows 10 sera présent sur un milliard de terminaux, toutes catégories confondues.

1 milliards de Windows
1 milliards de Windows

Ce message, porté devant un parterre de quelques milliers de développeurs a de quoi faire mouche. Quelle autre compagnie peut-elle proposer un tel marché aux développeurs ?

L’an dernier Microsoft annonçait Xamarin, outil qui permet aux développeurs C# de déployer leurs applications sous Android. Cette année c’est au tour du projet Astoria de permettre aux développeurs Android de transformer leurs applications en applications Windows. Intéressant pour les développeurs Android, probablement aussi pour le store Windows, un peu en retrait par rapport à Google Play ou au store iPhone.

La nouvelle qui fera peut-être le plus sourire les développeurs front est le nouveau navigateur Windows. Il faut dire qu’Internet Explorer traîne quelques casseroles et n’a jamais eu bonne presse auprès des développeurs. La sacro-sainte « compatibilité IE 6 » pour les clients d’un certain type de société nous a vraiment empoisonné la vie pendant des années. Exit donc Internet Explorer, bienvenue Microsoft Edge. On change le logo qui passe d’un E avec une orbite à un E pourvu d’une petite mèche. S’agit-il juste d’une changement de nom ? Probablement pas. À en juger par les outils présentés lors des présentations qui ont suivi la keynote, les possibilités de débugage et de mesure de performance le font ressembler à Chrome ou Firefox. Les mesures de performance affichées le place devant tout le monde. On verra à l’usage si les utilisateurs l’adoptent ou pas. Il n’empêche que la volonté de faire oublier le passif est bien là. Le plus amusant est probablement les soupirs de soulagement que l’on a pu entendre de la part des speakers (lors des conférences qui ont suivi) qui ont annoncés que le support de la série des Internet Explorer (jusqu’au 11) allait s’arrêter. On se dit que l’on n’a pas été les seuls à souffrir.

Le meilleur était pour la fin, avec une présentation d’un produit qui devrait arriver à la fin de cette année : les Hololens. Véritable bijou de technologie, ce casque de réalité augmentée est proprement renversant.


 

Cela fait déjà quelques mois que l’on parle de ce terminal, quelques vidéos de présentation sont disponibles sur Youtube. Mais il faut reconnaître que la présentation qui en a été faite à la keynote en a vraiment été le clou. Pas de date de sortie exacte (le produit n’est pas encore dans son état final), ni de prix. Vu le concentré de technologie, il faut à mon avis s’attendre à un joujou de quelques milliers d’euros.

Qu’aura-t-on vu lors de cette keynote ? Un musicien écrire une partition sur une tablette, du code Objective-C dans Visual Studio sur une machine Linux, de belles photos de la skyline de San Francisco, un robot virtuel mauve, des téléphones, des tablettes, des écrans géants, des applications Android sur des téléphones Windows et des fémurs cassés un peu n’importe comment. Superbe et passionnant spectacle !

Revoir Satya : http://channel9.msdn.com/Events/Build/2015/KEY01